Tribune/Repowering photovoltaïque : quand et comment donner un regain d’énergie aux centrales en sécurisant le tarif d’achat ?

Par Hélène Fischer-Barbonnier, avocate au barreau de Lyon – Droit de l’énergie – droit des affaires 

La durée des contrats d’obligation d’achat et de complément de rémunération est en principe fixée à 20 ans, mais la vie des installations de production photovoltaïque n’est pas toujours un long fleuve tranquille. Des incendies, impacts de grêle ou encore des tempêtes peuvent détruire ces installations.

En dehors de ces aléas, il arrive parfois également que certains panneaux solaires ne fonctionnent plus correctement de manière prématurée. En effet, il n’est pas rare que des installations subissent des dégradations au fil des mois et années en raison de nombreux phénomènes tels que la corrosion des bus barres, des points chauds, des pertes d’étanchéité, des délaminations ou encore ce que les spécialistes de la filière photovoltaïque appellent de manière imagée des « traces d’escargot », au point que cela nécessite une rénovation partielle ou totale des installations en cours d’exécution des contrats. Dans certains cas, les désordres affectant les installations peuvent mettre en péril la sécurité des personnes, animaux et/ou biens. Peuvent aussi apparaître des défauts techniques inhérents aux panneaux entrainant une perte anormale de performance et donc des pertes financières importantes pour les producteurs.

 

En apparence simples, ces opérations de repowering n’ont rien d’intuitif. Au contraire, répondant à une chronologie pré-établie, elles sont très complexes à de nombreux égards et présentent quelques chausse-trappes qui peuvent coûter cher à ceux qui s’y laissent prendre. Au vu des enjeux financiers considérables que représentent les opérations de remplacement des matériels défaillants (repowerings), il est essentiel de les sécuriser parfaitement du début à la fin. Les remplacements de convenance n’étant pas autorisés, toute la question est donc de savoir quels motifs peuvent justifier un remplacement des panneaux, et quel mode opératoire doit être mis en œuvre pour sécuriser le maintien du tarif d’achat applicable à l’installation depuis sa mise en service.

 

Voici quelques éléments clés :

 

  • Bien identifier la catégorie de contrats à laquelle appartient la centrale « malade » et les spécificités réglementaires auxquelles elle est assujettie …

 

Face à ces cas de figure divers et variés, et pour éviter que des producteurs ne soient tentés de rechercher par le biais de ces opérations des effets d’aubaine lorsque les tarifs d’achat issus de mécanismes de soutien étatiques sont élevés, la Direction Générale de l’Energie et du Climat (DGEC) du ministère de la transition énergétique est venue fixer un cadre très précis et strict s’imposant à tous, y compris aux acheteurs obligés investis d’une mission de service public que sont EDF et la centaine d’entreprises locales de distribution (ELD) implantées sur le territoire français.

Ces opérations sont d’autant plus délicates que les règles du jeu fixées par la DGEC diffèrent selon les typologies de contrats concernées. Ainsi, les cas de figure éligibles aux repowerings et les points de vigilance seront différents selon que l’installation bénéficie d’un contrat issu de l’arrêté tarifaire du 10 juillet 2006, de l’arrêté tarifaire du 9 mai 2017 ou encore qu’elle est lauréate d’un appel d’offres lancé par la Commission de Régulation de l’Energie (CRE).

 

  • Bien diagnostiquer la ou les pathologies affectant les panneaux, vérifier qu’elles sont éligibles à un repowering et respecter rigoureusement le protocole…

 

Il est primordial que les producteurs et les différents intervenants qu’ils seront amenés à missionner dans le cadre des repowerings (conseils techniques, installateurs, experts judiciaires ou d’assureurs, bureaux de contrôles, conseils juridiques etc…) soient parfaitement à même d’identifier les défauts portant atteinte au fonctionnement des centrales et maîtrisent les exigences fixées les décrets, arrêtés et instructions ministérielles. Il faut agir de manière transparente vis-à-vis de l’acheteur puisque les conditions générales de tous les types de contrats obligent le producteur à tenir l’acheteur informé des modifications éventuelles de son installation avant toute réalisation. L’accord de principe d’EDF doit donc être demandé et obtenu expressément avant le début des travaux de repowering. Gare aux producteurs pour lesquels un remplacement occulte serait débusqué à l’occasion d’un contrôle a posteriori ou qui s’écarteraient des règles fixées par la DGEC : ils s’exposeraient à la perte du tarif d’origine, laquelle peut être rétroactive. Un producteur averti en vaut deux !

Il faut donc aussi agir de manière éclairée et méthodique tout au long du processus de remplacement du système photovoltaïque. Deux règles fondamentales doivent être cumulativement respectées quel que soit le cas de figure éligible au repowering :

- La puissance installée à l’origine ne doit pas être modifiée de plus de 10% après rénovation, que ce soit à la hausse ou à la baisse, sauf disposition spécifique réglementaire ou légale. Sur une même surface de toiture ou au sol, il est possible d’installer des panneaux plus puissants et ensuite de réaliser une nouvelle centrale sur l’espace libéré. Bien menée, une opération de repowering peut donc procurer un regain d’énergie et de rentabilité.

- et les caractéristiques de l’installation indiquées dans les conditions particulières des contrats doivent être identiques, en particulier la technologie d’intégration au bâti. La question du maintien de la technologie d’intégration au bâti est cruciale et peut s’avérer délicate, surtout s’agissant des contrats issus de l’arrêté du 12 janvier 2010.

 

Et enfin s’en remettre à des spécialistes, du début à la fin…

Il est très important, en début de processus, de recourir à un expert indépendant justifiant de son habilitation à établir un rapport probant qui viendra appuyer de la demande d’accord de remplacement à adresser à EDF. Le contenu des rapports d’expertises doit répondre rigoureusement aux exigences fixées par la DGEC.

 

A l’issue des opérations de rénovations, en fonction de la puissance de l’installation, la poursuite du contrat est conditionnée par la remise à EDF d’une attestation de conformité délivrée par un organisme agréé au titre du référentiel contrôle. Dès la genèse du besoin et tout au long du processus de repowering qui s’achève par la signature d’un avenant de changement de puissance, il est vivement recommandé de solliciter un conseil juridique ayant une connaissance très pointue des dispositifs réglementaires spécifiques à chaque type de contrat afin qu’il assure le suivi des démarches à réaliser. En effet, il y a des principes généraux, mais aussi de subtiles exceptions !

 

En conclusion, vous l’aurez compris, les repowerings ne doivent pas susciter de craintes démesurées, mais il faut avoir à l’esprit que la clé de leur succès réside dans l’intervention aux côtés du producteur d’experts techniques, juridiques et financiers ainsi que le respect d’une méthodologie balisée, mais nécessitant une analyse au cas par cas. Il ne s’agit en aucun cas d’enjamber hâtivement le processus, mais de le respecter étape par étape en fonction des exigences réglementaires qui s’imposent à chaque type de centrale.

 

                                                                      

 

 

 

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