ITV Emmanuelle Cosse : « Plus on maîtrise l’énergie, plus on protège les locataires »

Annoncée déjà l’an dernier, l’idée de la création d’une Alliance des HLM pour les Energies renouvelables est revenue sur la table lors du dernier Congrès Hlm de cet automne 2025. Emmanuelle Cosse, présidente de l’Union Sociale pour l’Habitat (USH), y voit un moyen de fédérer l’ensemble des bailleurs dans une sorte de think tank autour d’un objectif : développer le plus possible d’EnR dans le parc locatif pour maîtriser les charges et décarboner les usages. Entretien !
Plein Soleil : Pourquoi créer une Alliance des Hlm pour les énergies renouvelables ?

Emmanuelle Cosse : L’objectif est simple. De nombreux bailleurs sociaux engagés dans la réhabilitation ont envie de développer les EnR au sein de leur parc. Au-delà de ce que leur apporte l’USH en matière de bonnes pratiques, ils ont des difficultés à se faire entendre sur le sujet. Cette Alliance serait donc une forme de « think tank » de bailleurs intéressés par le sujet renouvelable en lien avec les collectivités locales et l’écosystème EnR. De quoi donner de la visibilité à ce travail et permettre de développer les projets ! Développer un projet EnR n’est pas simple. Les bailleurs ne savent pas toujours par quel bout le prendre. Cela ne fonctionne pas toujours. Des bailleurs ont fait des propositions. Nous voulons partager les expériences et les bonnes volontés.
« Les EnR dans le logement social, cela ne va pas de soi »
PS : Il faut dire que l’énergie est devenue une problématique majeure dans le logement social, source de précarité. Les EnR sont-elles de bons leviers pour y remédier ?

EC : D’abord, il faut dire que notre métier n’est pas de produire de l’énergie. La difficulté d’appréhender les EnR vient aussi de là. Cela ne va pas de soi. Maintenant, il est vrai qu’avec la guerre en Ukraine, nous avons subi de plein fouet la hausse de l’électricité en 2022. Les bailleurs n’y étaient pour rien dans cette augmentation comme certains locataires ont pu le penser. Après, il ne faut pas être cynique. Si les locataires peinent à faire face à leurs charges en matière d’énergie, viendra après le tour du loyer qu’ils ne pourront plus payer. Il est donc de notre rôle de trouver des solutions. L’Alliance y aidera. Vous savez, plus nous maîtriserons l’énergie, plus nous protégerons nos locataires. Les locataires ont le droit de vivre correctement dans leur logement, loin de toute précarité.

PS : Les locataires sont-ils appétents aux EnR ?

EC : Oui, mais il faut aussi beaucoup de pédagogie. Les locataires doivent accepter les équipements renouvelables et maîtriser les usages. J’ai en tête un bailleur social qui a loué des maisons individuelles avec des EnR mais il y a eu des difficultés entre les locataires et les opérateurs choisis. Tout cela doit être bien étudié et bien conçu en amont pour éviter les oppositions. Il en va aussi de la décarbonation des énergies dans le logement social.

« Sortir des projets d’EnR par des aides philanthropiques, c’est vraiment très chouette »

PS : Une association comme Sol Solidaire à laquelle l’USH s’est associée dès la première heure participe à lutter contre la précarité via l’autoconsommation collective solaire. Une aide bienvenue ?

EC : Sol Solidaire, à l’initiative d’André Joffre, est un concept très intéressant qui permet de développer le solaire en autoconsommation dans le logement social pour faire baisser les charges. Ce qui est bien c’est que Sol Solidaire met en relation les acteurs des EnR avec le monde du logement social et ses enjeux de fragilité. L’association apporte des moyens techniques de bon niveau pour pallier la complexité des projets. Et un soutien financier substantiel également pour soutenir les CAPEX. Sortir des projets d’EnR par des aides philanthropiques, c’est vraiment très chouette. Le modèle est vertueux…

PS : Vous avez été ministre du logement et de l’Habitat durable. Un mot du contexte politique actuel autour des EnR.
EC : L’opposition du RN et des LR aux EnR est totalement erronée. Je pense qu’ils n’ont pas conscience de qu’ils disent. Pourquoi autant de freins, qu’est-ce qu’ils craignent ? Les EnR, et je le regrette d’ailleurs, ne vont pas faire vaciller le nucléaire tout de suite. Aujourd’hui, les consommateurs et les territoires ont besoin d’énergie au juste prix, une énergie produite avec intelligence par les ressources issues de leur environnement naturel. Le RN et les LR sont contre les éoliennes et le solaire par peur d’une remise en cause des marchés établis. Ils sont passéistes et vont dans le sens inverse de l’histoire. Regardez comme l’Espagne s’en sort bien avec un développement dynamique des EnR !

Sus aux idées reçues

PS : Vous évoquez aussi les idées reçues et le manque d’engagement des « pros » EnR ?

EC : Vous savez, dans le logement social et dans le secteur des Hlm, nous souffrons beaucoup des idées reçues, dans une forme de dénigrement. Je pense qu’il faudrait que les acteurs des EnR se saisissent de cela et travaillent sur les idées reçues. Ils doivent s’y attaquer et lutter contre avec un argumentaire solide autour de l’idée du local et des circuits courts, de l’emploi, du développement des entreprises, de la protection induite quant aux fluctuations des coûts ou encore de la notion d’indépendance et de souveraineté… On n’entend pas assez de monde pour défendre ses positions. Pendant ce temps, le RN et les LR surfent sur les oppositions aux EnR.
Prochaine réunion de l’Alliance des Hlm pour les EnR le 4 décembre à l’Auditorium de la SMA BTP à Paris

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