Au moins 3,5 millions de ménages en situation de précarité énergétique en 2019

L’Observatoire National de la Précarité Énergétique (ONPE)1 vient de publier les résultats de son tableau de bord 2020 qui révèle  que  3,5  millions de  ménages  pauvres et modestes connaissent des  difficultés  à  payer  leurs  factures d’énergie en France en 2019. Cet indicateur est en léger recul mais ne préjuge pas de la situation des plus pauvres.

Comme chaque année depuis sa création en 2011, l’ONPE et ses 29 partenaires œuvrent pour quantifier et qualifier l’ampleur du problème, assurer le suivi et la mesure des aides et des dispositifs existants, faire état des difficultés des ménages et identifier les leviers d’action pour lutter efficacement contre ce phénomène. Pour ce faire, l’ONPE s’appuie actuellement sur deux indicateurs calculés à l’aide de nouveaux outils : un indicateur économique basé sur le taux d’effort énergétique 2  et un indicateur basé sur le ressenti du froid. « Au-delà de la mobilisation de ses partenaires et des outils d’aide à la décision proposés par l’ONPE, nous devons plus que jamais créer des synergies pour trouver des modes d’intervention plus adaptés à ces situations afin d’amortir cette crise économique et sanitaire qui fragilise d’abord les populations les plus précaires et risque de les faire basculer demain dans des situations de grande pauvreté. » Arnaud Leroy, Président de l’ONPE et de l’ADEME

 

La précarité énergétique impacte considérablement 30% des plus pauvres

 

En 2019, 11,9 % des Français, soit 3,5 millions de ménages, sont en situation de précarité énergétique et font partie des ménages les plus modestes, d’après l’indicateur basé sur le taux d’effort énergétique estimé par le ministère de la Transition écologique 3. Cet indicateur baisse légèrement en 2019 après une hausse en 2018 (12,1% en 2018), alors que les températures hivernales ont été, comme l’année précédente, relativement douces. La baisse de la consommation moyenne d’énergie par logement, en lien avec l’amélioration sensible des performances d’une partie des logements et des équipements de chauffage participe à cette légère inflexion. La hausse du prix hors taxes de l’énergie et la stagnation du pouvoir d’achat freinent toutefois le recul de la précarité énergétique.

 

Les experts de l’ONPE alertent sur le risque de voir la précarité énergétique s’aggraver dans les années à venir en raison de l’augmentation du prix des énergies et de la diminution des aides financières (chèques énergie, aides FSL et aides directes) et s’inquiètent d’une augmentation du nombre de ménages ayant souffert du froid au cours de l’hiver dernier, en particulier chez les plus jeunes (18-34 ans) : 66 % d’entre eux ont restreint leur chauffage et 32 % déclarent rencontrer des difficultés de paiement.

 

Les dépenses énergétiques, un sujet d’inquiétude pour une majorité des Français

 

Pour  les  Français,  la  consommation  d’énergie  est  devenue  un  sujet  d’inquiétude  important.  En  effet,  d’après  le baromètre Energie-Info  2020,  80%  des  ménages déclarent  que  la consommation d’énergie  est un  réel  sujet  de préoccupation contre 70% en 2019 4 . Après une légère atténuation entre 2013 et 2018, il s’agit de la proportion la plus élevée depuis son suivi en  2007.  71%  des  Français  déclarent  que  les  factures  de  gaz  et  d’électricité  représentent « une  part  importante  dans  les dépenses de leur foyer » (contre 63 % en 2019).

 

Par  ailleurs,  le  nombre  de  ménages  qui  rencontrent  des  difficultés  de  paiement  de  leurs  factures  d’énergie  a fortement augmenté. Il passe de 10 % en 2013 à 18 % en 2020 et se traduit par une hausse des interventions pour coupures. En 2019,  671 546 ménages ont subi l’intervention d’un fournisseur d’énergie suite à des impayés (+ 17% par rapport à 2018).   Les associations et les acteurs du terrain signalent que la baisse constante du pouvoir d’achat contraint les ménages à opérer  des  choix  budgétaires  drastiques.  Garder  son logement implique  pour  ces  personnes  des  arbitrages,  des renoncements, des privations, et un recours croissant aux aides d’urgence pour éviter l’endettement, les coupures d’énergie et les expulsions.

 

La précarité énergétique risque de s’intensifier en 2020 et 2021, avec des difficultés plus importantes en période de confinement pour les ménages précaires

 

Les  mesures  de  confinement  déployées  par le  Gouvernement  pour répondre  à la crise  sanitaire  ont  eu  plusieurs conséquences  sur  les  ménages  Français,  encore  plus  importantes  pour  les  ménages  en  situation  de  précarité énergétique.

 

•  Les revenus d’activité ont diminué du fait du chômage partiel, des arrêts maladie pour garde d’enfant ou du recul des “petits jobs”.

•  Le paiement des factures d’énergie a été suspendu durant les périodes allongées de la trêve hivernale, ce qui laisse craindre une explosion des impayés d’énergie et des demandes d’aides aux services sociaux après les trêves successives de 2020/2021.

•  Le confinement a favorisé l’isolement et la cohabitation contrainte dans des logements inconfortables.

•  Les visites à domicile et les travaux d’amélioration du logement ont été freinés.

 

La crise sanitaire traversée en 2020 a souligné l’importance du logement et son caractère inégalitaire. Pour ceux qui éprouvent du mal à se loger et se chauffer correctement, les effets socio-économiques de la crise risquent fort d’amplifier leurs difficultés. Dans ce contexte, l’ONPE a souhaité mettre  un coup de projecteur sur le vécu des personnes qui souffrent de précarité énergétique à travers la parution de cet ouvrage thématique numérique. “La

précarité  énergétique  au  quotidien”  est  une  compilation  de  30  témoignages,  recueillis  par  deux  sociologues.  Organisé en dix thématiques, il souligne les multiples facettes du phénomène pour mieux le comprendre. Pour les professionnels, l’ouvrage permettra d’enrichir leurs connaissances de ces publics et d’adapter leurs réponses adaptées aux situations particulières et contrastées.

 

1  L’Observatoire National de la Précarité Energétique est un outil d’observation et un instrument d’analyse des politiques publiques de lutte contre la précarité énergétique au service des acteurs nationaux et territoriaux. Il a été créé le 1er mars 2011 dans le cadre de la loi du 12 juillet 2010, dite loi Grenelle 2 de l’Environnement.

2  Le taux d’effort énergétique correspond à la part des dépenses totales d’énergie dans le logement sur le revenu disponible du ménage ; le seuil au-delà

duquel un ménage est considéré en précarité énergétique est de 8 % (soit près de deux fois la médiane)

3  Ces ménages dépensent plus de 8% de leurs revenus pour payer leur facture énergétique du logement

4 Source :  Baromètre Info-Energie, Médiateur national de l’énergie (2020)

Champ :  Échantillon de 1 998 personnes

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