Thierry Lepercq écrit au secrétaire du CE de Bosch Solar Vénissieux. Morceaux choisis€

Le 12 septembre je reçois un coup de téléphone d’un conseiller du Ministre du Redressement Productif m’informant qu’une délégation de la CFDT Bosch Vénissieux sera reçue le lundi 16 septembre par le Ministre de l’Energie, M. Martin, en vue, je cite de faire un certain nombre d’annonces à cette délégation pour s’assurer que celle-ci renonce à son projet de perturber l’intervention présidentielle du 20 septembre dans le cadre de la Conférence Environnementale, notamment en s’interposant devant les caméras de télévision. La réception de votre délégation à l’Elysée immédiatement avant la dite Conférence avait de toute évidence le même objectif.

Le 2 octobre nous présentons le projet Sillia/Vénissieux au consortium xGWc, autrement appelé Airbus du solaire, (projet franco-germano-suisse de production de 1 GW de cellules photovoltaïques en Alsace sur la base de la technologie française de l’hétérojonction), composé du CEA/INES, Fraunhofer (l’équivalent allemand du CNRS) et CESM (l’équivalent suisse). Réception enthousiaste, le projet Sillia/Vénissieux étant considéré (à juste titre) comme extrêmement complémentaire (cellules d’un côté, modules de l’autre).

Le 8 octobre nous finalisons notre plan industriel avec Sillia qui montre que nous pouvons faire de Bosch-Vénissieux, grâce au mécanisme d’intégration amont/aval conçu par Solcoop pour optimiser les processus et minimiser les coûts, un site au meilleur niveau de compétitivité européen pour la production de modules photovoltaïques.

Le 9 octobre nous sommes informés par les conseillers des ministres que notre projet et le dispositif tarifaire demandé sont rejetés pour deux raisons : L’administration ne croit pas que la production de cellules et de modules photovoltaïques puisse être sérieusement envisagée en France au motif qu’il s’agit d’une industrie de commodité (motif qu’éclaire la position du groupe Total relatée ci-après) et qu’il n’est pas envisageable de préempter les décisions qui seront prises en 2014 dans le cadre de la loi sur la transition énergétique en laissant supposer que le solaire pourrait avoir autre chose qu’une place symbolique (motif qu’éclaire la position du groupe GDF Suez relatée ci-après).

Le 10 octobre, informés de la décision gouvernementale sur Sillia/Vénissieux les membres français, allemands et suisses du consortium xGWc expriment leur consternation, y voyant un présage très néfaste pour leur propre projet de relance pan-européenne de l’industrie photovoltaïque. Ces décisions sont à mettre en regard avec les prises de position de certains énergéticiens, si puissants qu’ils déterminent en fait la politique de notre pays, et qui semblent très soucieux de faire en sorte que la France reste sous la coupe de nos principaux fournisseurs de gaz à l’étranger.

Le 2 octobre un haut représentant du groupe Total, face à la présentation du projet xGWC par la patron du Fraunhofer, lui confirme publiquement lors de la conférence EU PVSEC à Paris (une centaine de personnes présentes) que son groupe ne croit pas à la production industrielle en France et mise sur ses propres usines photovoltaïques en Asie. Visiblement produire de l’électricité compétitive (moins de 100 €/MWh) avec des produits Made in France est vu comme une concurrence insupportable face au modèle de dépendance énergétique et stratégique sur lequel est fondé la stratégie de son groupe.

Le 11 octobre le président du groupe GDF Suez organise une conférence de presse au cours de laquelle il recommande la révision des dispositifs relatifs aux énergies renouvelables compétitives (photovoltaïque et éolien terrestre) au motif qu’elles concurrencent le gaz importé par son entreprise et d’autres grands groupes européens, et demande la concentration des aides publiques sur les filières les plus onéreuses (éolien offshore et hydrolien), qui ne représentent pas de concurrence sérieuse pour le gaz importé. Le consommateur français d’électricité appréciera qu’on veuille ainsi accélérer la hausse de ses factures alors qu’elles pourraient être contenues grâce aux énergies renouvelables les plus compétitives.

Le 12 octobre le gouvernement britannique annonce son intention de confier à un consortium franco-chinois conduit par EDF et bénéficiant de différents dispositifs assurantiels mis en place par le gouvernement français, la construction d’une nouvelle centrale nucléaire (EPR) pour 16,5 milliards d’euros en échange d’un tarif d’achat proche de 109 €/MWh, soit 10% de plus que le tarif demandé par Sillia/Solcoop. Le solaire Made in France moins cher que le nucléaire: c’est insupportable !

Cet article est publié dans Actualités. Ajouter aux favoris.

Les commentaires sont fermés