Reportage /Apollon Solar : l’aval de la filière solaire, une activité « very NICE »

Créée en 2001 par trois anciens mousquetaires de chez Photowatt (Robert  Defranclieu, Hubert. Lauvray et Klaus .Bamberg) à destination de la R&D et de l’ingénierie solaire, l’entreprise lyonnaise Apollon Solar va se tourner dans les mois qui viennent dans la fabrication et la vente de panneaux photovoltaïques à fort potentiel de recyclabilité. Une ligne de production de 50 MW se mettra en place pendant l’été. Nom des panneaux : N.I.C.E. pour New Industrial Cells Encapsulation ! Une nouvelle aventure industrielle pour montrer que oui, il est encore possible de fabriquer des modules PV dotés d’une technologie innovante en France !

En début d’année 2019, la société Apollon Solar a quitté ses bureaux du centre de Lyon devenus trop exigus pour investir un nouveau bâtiment de 2000 m² dans la banlieue lyonnaise. Si la R&D et l’ingénierie sont peu consommatrices de foncier, la fabrication, pour sa part, en est gourmande. Ce déménagement marque ainsi le tournant de la stratégie et du business model de l’entreprise qui n’avait pas, par essence, vocation à exploiter le fruit de ses recherches.

Un procédé d’encapsulation innovant et écologique

Le changement de cap a débuté fin 2015, lorsqu’Emmanuel Alves, actionnaire à la genèse d’Apollon Solar, reprend la totalité de l’entreprise après le départ à la retraite des trois fondateurs. Ce patron d’un groupe familial français spécialisé dans la chimie fine, les matières premières aromatiques et les huiles essentielles, Elixens (CA ; 50 millions d’€), croit fermement au devenir d’une production de modules solaires en France à partir de la technologie N.I.C.E., issue des recherches d’Apollon Solar. Le fringant octogénaire recapitalise l’entreprise sur fonds propres à hauteur de 6 millions d’€. « Très vite, nous avons mis au point un cahier des charges et modélisé une ligne de production avec un partenaire industriel français. Cette ligne, assemblée en France, est conçue pour assembler des panneaux bi-verre selon la technologie N.I.C.E., un procédé d’encapsulation innovant développé chez nous dans les années 2000 et qui permet de se passer d’encapsulants (EVA ou POE) via une légère dépression dans le module permettant ainsi la mise en place de la continuité  électrique. Cette spécificité nous permet d’améliorer le bilan carbone mais aussi la recyclabilité du module par une séparation aisée des différents composants lors du traitement, ce qui n’est pas le cas avec les technologies de lamination» assure Jed Kraiem, directeur d’Apollon Solar. Par ailleurs, le principe a déjà été éprouvé puisqu’une première ligne prototype avait été mise en place en 2007 à l’INES et des modules de l’époque certifiés par le TUV sont toujours en fonctionnement. A moyen terme, l’atelier pourrait avoir une capacité annuelle de production de 50 MW soit environ 160 000 panneaux solaires d’une puissance comprise entre 300 et 330 Wc, les tendances actuelles du marché.

Des garanties de 20 à 25 ans

La ligne d’assemblage entièrement robotisée sera installée au cours de l’été 2020. Dans l’attente d’une certification par Certisolis, les premiers modules bi-verre N.I.C.E. commercialisables devraient sortir de l’usine avant la fin de l’année 2020. « La cible : les marchés des collectivités et du résidentiel via des réseaux d’installateurs. Pour les appels d’offres CRE portant sur les grandes centrales, notre capacité est un peu limitée pour l’heure et nous ne sommes pas encore suffisamment compétitifs. Sans pour autant afficher des prix  mais qui s’ajustent mieux avec le résidentiel ou les institutionnels en quête de produits français de qualité, de garantie de longue durée, et recyclable. Nous croyons à l’attrait des produits Made in France pour les consommateurs dans le contexte post Covid-19. Une question de confiance ! » poursuit Jed Kraiem. Dans l’attente des modules solaires N.I.C.E., Apollon Solar va d’ores et déjà, pour la rentrée de septembre, proposer des kits solaires de 3 kWc avec des panneaux asiatiques de haute puissance de 375 Wc pour démarrer l’activité. « Cette proposition commerciale sera un tremplin pour nos modules français N.I.C.E. à venir, dans notre philosophie de haute qualité et de hautes garanties entre 20 et 25 ans pour l’ensemble de nos modules. Nous devons être en capacité de rassurer nos futurs clients » souligne le directeur d’Apollon Solar qui commence à déployer son réseau commercial. D’autre part la technologie N.IC.E. elle-même, intéresse de nombreux fabricants de panneaux photovoltaïques étrangers. Un nouveau métier pour cette pépite française du développement solaire hexagonal…

Encadré

La percée avortée du silicium métallurgique purifié

Outre la technologie NICE, Apollon Solar a développé dans les années 2000-2010, en partenariat avec Ferropem (ex-Pechiney électrométallurgie), filiale du groupe espagnol Ferroglobe, le CNRS et le CEA, un procédé à base de silicium métallurgique solaire purifier par une technologie plasma. L’ADEME a également apporté son soutien à la deuxième phase du projet via un AMI . Ce procédé innovant se révélait moins énergivore que le process Siemens par phases gazeuses qui était en contrepartie un peu plus efficient. « Par ailleurs, les résultats obtenus avec ce Silicium purifié par voie métallurgique étaient plus qu’honorables, puisque des monocristaux ont été obtenus, chose possible uniquement avec un matériau de très haute pureté et des cellules réalisées en collaboration avec les meilleurs instituts mondiaux (ANU et UNSW en Australie) ont permis  d’atteindre un rendement de 22.6%, soit le record mondial pour ce type de matériau. Cela a été notre trophée de guerre. Un succès technologique qui s’est mué hélas, en échec commercial pour des raisons financières et de stratégiques » relate Jed Kraiem. A la question du devenir de cette technologie métallurgique aujourd’hui, le directeur d’Apollon Solar apporte une réponse sans appel. «A ce jour, avec les capacités de production qui ont littéralement explosé en Asie, le prix du silicium électronique est tombé à 10 dollars le kilo. Il devient inutile de se battre pour relancer une brique technologique qui ne dégagerait pas de marge. Je trouve d’ailleurs un peu idéologique la position de certains qui veulent à tous prix relancer une filière industrielle du silicium et de la cellule en France. La valeur ajoutée du solaire est ailleurs mais il faut se donner la peine de creuser en profondeur » conclut-il.

 

 

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