Les ombres errantes est le titre d’un recueil d’apophtegmes de Pascal Quignard qui reçu le prix Goncourt en 2002. Une merveille de littérature ! Et justement, ce titre colle à merveille à l’actualité solaire du moment. L’article 40 de la loi Aper du 10 mars 2023 porte sur l’obligation de solarisation des parkings de plus de 1500 m², tous ces espaces d’ores et déjà anthropisés situées en lisière des grosses « Boîtes » qui ont phagocyté les entrées des villes françaises.
Une initiative louable, intelligente, pertinente, sans conflit d’usage entre l’utilisation du foncier et la production d’énergie. Un lieu de production d’énergie verte au plus proche de lieux d’hyper consommation, de recharge de véhicules électriques, qui plus est, en synergie diurne spatio-temporelle. L’autoconsommation comme une évidence … En prime, ces installations photovoltaïques distillent des ombres bienveillantes qui protègent les voitures et leurs propriétaires des canicules.
Depuis quelques jours, depuis le 15 mai plus exactement, les ombres sont désormais des ombres errantes, en sursis. Les députés ont en effet adopté, le 15 mai dernier, le projet de loi de simplification du droit de l’urbanisme et du logement. Un amendement y a modifié l’article 40 de la loi Aper, un amendement qui vise à assouplir l’obligation de solarisation des parkings. Il prévoit que le propriétaire du parking pourra remplir l’obligation de participer à la transition énergétique de cet espace soit en solarisant le parking, soit en assurant l’ombrage du parking grâce à des arbres, soit en déployant un mix des deux, ou encore en installant de la production ENR ailleurs, équivalente à ce qu’aurait représenté la mise en place d’ombrières avec panneaux photovoltaïques.
De quoi faire réagir l’avocat Arnaud Gossement : « Depuis 2021, le cadre juridique de l’obligation de solarisation des parkings n’en finit donc pas d’évoluer (loi, décret, arrêté), d’être modifié, d’être complexifié par une vague de dérogations et d’exemptions, d’être reporté et, désormais d’être quasiment effacé ». Le risque est grand. Le projet de loi doit être discuté en séance publique au Sénat le 17 juin prochain lors de la navette parlementaire. « Il arrive que le pouvoir soit méprisable, les institutions déshonorantes… » écrit Pascal Quignard dans les Ombres errantes. Les sénateurs sont encore à temps pour rectifier le tir. Verdict attendu la veille de l’appel du Général de Gaulle…