A la croisée du BePOS et de l'autoconsommation : L'exemple de la Cité Municipale de Bordeaux

Développée en Partenariat Public-Privé avec la Ville de Bordeaux, la Cité municipale de la capitale girondine a été livrée à l’été 2014. Alliant une esthétique architecturale à une ambition environnementale, ce bâtiment à énergie positive autoconsomme une partie de l’électricité photovoltaïque qu’il produit. Un projet d’autoconsommation réalisé dans le cadre des appels à projets de la région Aquitaine. Exemplaire !

« Tout est politique » clamait-on en 1968. Pas de doute sur le sujet en ce qui concerne les énergies renouvelables en France ! Ainsi, le système d’autoconsommation photovoltaïque sur la cité municipale de Bordeaux, est né de volontés politiques croisées, celles des deux Alain, Alain Rousset, président de la Région Aquitaine qui a été le premier a lancé en France des appels à projets sur l’autoconsommation et Alain Juppé, maire de Bordeaux, ancien et éphémère ministre de l’écologie qui a souhaité faire de sa cité municipale un parangon en matière environnementale. La RT 2020 programmée à la genèse du projet a très vite été caduque. Tous les acteurs du Partenariat Public Privé ont décidé d’aller chercher la norme BePOS autour d’une ambition : Que ce bâtiment de huit étages et 21 000 m² de SHOB en plein centre historique de Bordeaux autoconsomme tout ou partie de sa production solaire photovoltaïque.

Le premier module 345W de SunPower produit et posé en France

La société Gaz de Bordeaux a eu en charge la partie énergétique du projet. Sur le registre de l’autoconsommation photovoltaïque, elle a fait appel à l’entreprise Domo Helios, une PME spécialiste de solaire photovoltaïque membre du très actif cluster Sysolia, Systèmes solaires industriels en Aquitaine. Domo Helios installe déjà de petits systèmes solaires en autoconsommation (voir encadré). Reste que dans le cas de la cité municipale de Bordeaux, l’échelle et le challenge étaient tout autre. « Nous cumulions un nombre de défis impressionnant à relever. Les préconisations des ABF (Architectes des Bâtiments de France) étaient sans appel par rapport au bâtiment situé dans le quartier historique de Bordeaux. Les modules photovoltaïques devaient être totalement invisibles. D’autre part, il fallait compenser en énergie les 9 niveaux du bâtiment. De par la position des modules quasiment à l’horizontale et les exigences énergétiques du BePOS, à savoir produire plus d’énergie que le bâtiment n’en consomme, la puissance nécessaire se montait à plus de 300 kW couplés à 22 onduleurs SMA triphasés. Cette puissance devait être délivrée sur une surface disponible très limitée, obligeant de disposer d’une puissance installée de 215 W/ m². Un seul fabricant au monde était capable d’atteindre ce niveau de performance: SunPower, et ceci sur des produits qui n’existaient pas encore au démarrage du projet » indique Christian Baudon gérant de la société Domo Helios. Au fil des mois, le bureau d’études Domo Helios affinait a donc affiné ses simulations en utilisant des outils 3D de plus en plus performants. Grace au partenariat Domo Helios/SunPower, le projet de cité municipale a pu disposer des tout premiers modules 345Wc fabriqués sur Toulouse par SunPower, permettant par la même d’obtenir une empreinte carbone très faible. « Le système est composé de 855 modules disposés au sol par vagues, mais également sur les édicules techniques. Nous avons utilisé le système de fixation Surface 5 solar, un procédé qui permet de fixer des modules cadrés sur des toitures-terrasses. Cette technique ne conditionne pas la mise hors d’eau du bâtiment et permet également une maintenance aisée. Un chantier unique à plus de 40 m de haut en plein centre de Bordeaux » poursuit fièrement le chef d’entreprise. Résultats : La production annuelle de 304 MWh couvrira les besoins électriques du bâtiment estimés à 171 MWh du point de vue de la norme BePOS.

100% de la production injectyée en autoconsommation

Non content de parvenir au BePOS, la volonté de Gaz de Bordeaux et de Domo Helios était également de faire de ce projet une véritable vitrine de l’autoconsommation photovoltaïque. Ainsi, sur les quelque 300 kWc installés, 250 kWc ont été posés dans le cadre de l’appel d’offres 100-250 kWc avec un contrat de vente à EDF pour un tarif d’achat de 16,5 centimes d’€. Un peu plus de 50 kWc ont, pour leur part été dédiés à l’alimentation des pompes à chaleur du bâtiment en autoconsommation. « Notre objectif était de fournir chaque jour plus de 50% de production solaire électrique pour faire fonctionner la machinerie. Fournir plus qu’EDF sur ces systèmes qui consomment 140 MWh électrique par an, tel était le défi. Et cela tombe plutôt bien car c’est l’été, quand le soleil brille, que les besoins sont les plus importants sous l’effet du fonctionnement de la climatisation. Reste qu’aujourd’hui, la totalité de l’électricité est autoconsommée, l’installation de 250 kWc n’a toujours pas été raccordée et injecte 100% de la production en autoconsommation. Les résultats sont assez probants, à tel point que le raccordement au réseau ne serait plus forcément d’actualité» s’exclame Christian Baudon. Il faut dire que la facture d’ErDF est salée avec un coût de raccordement plus que prohibitif. Avec la parité qui approche, le jeu en vaut-il la chandelle, entre coût de raccordement et frais de compteurs. Tout le monde se trouve dans une situation d’apprentissage. Nous attendons les calculs sur les consommations réelles pour trancher » reconnaît Christian Baudon. Quid des jours de fin de semaine lorsque la Cité Municipale tourne au ralenti ? Très intelligemment, les pompes à chaleur dopées à l’électricité solaire alimentent également plusieurs autres bâtiments à travers un réseau de chaleur. C’est notamment le cas du Musée des Beaux-Arts voisin mais aussi de quelques salles de réunion qui profitent notamment en été de la « climatisation solaire ».

Les changements d’habitude aussi importants que les technologies

Sur ce projet, la société Domo Helios a pu valoriser son savoir-faire consacré à l’autoconsommation qu’elle exerce depuis plusieurs mois déjà. « Il existe déjà un marché en autoconsommation pour des systèmes de 1500 W que nous installons sur des mini sheds au fond des jardins. Ils ont été conçus à la base pour des pompes piscines. Ces systèmes couvrent la base de consommation électrique des ménages, ils couvrent le bruit de fonds. Les économies réalisées par les clients peuvent monter jusqu’à 30% du montant de leur facture. Un couple de retraités qui a changé ses habitudes est même parvenu à faire 54% d’économies. Comme quoi les changements d’habitude sont au moins aussi importants que les technologies qu’on apporte » conclut Christian Baudon. A Bordeaux, certaines règles ont ainsi été imposées au personnel municipal pour optimiser le processus d’autoconsommation, ce qui le rend d’autant plus efficace et conforte une autoconsomation à 100%. En attendant le règne des smarts grids et des objets connectés qui rendront ces contraintes plus faciles à vivre encore pour le personnel municipal ! Pour Pascal Latorre, chargé de mission en charge des appels à projets autoconsommation à la Région Aquitaine, ce projet de la Cité Municipale correspond à la philosophie de que la Région se fait d’une autoconsommation optimisée dans le secteur tertiaire. « Reste que le marché de demain du photovoltaïque autoconsommé se situe vers la grande distribution qui a des consommations très importantes à couvrir 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7. Nous le voyons à travers nos appels à projets » affirme-t-il. De la Cité Municipale à l’hypermarché, le solaire photovoltaïque voit son avenir dans l’autoconsommation !

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