Edito/Le politique se rebiffe contre la technostructure nucléairophile

S’appuyant sur un rapport de l’AIE, le journaliste Bruno Cot expliquait dernièrement dans “l’Express”, que partout dans le monde, l’énergie solaire est promise à un avenir radieux mais qu’elle peine encore à prendre son essor dans notre pays à forte prédominance nucléaire. Ceci expliquant certainement un tantinet cela. « La France est toujours à la traîne pour le photovoltaïque, mais peut-être plus pour très longtemps » analyse-t-il. Il prend là comme référence la future PPE, dont on attend la mouture définitive comme d’autres attendent Godot, qui prévoit une multiplication par 5 de la puissance photovoltaïque installée à 44,5 GW en 2028.

La PPE à venir serait donc un signal fort d’un changement de braquet dans l’évolution du solaire. Car c’est un fait, le développement des énergies renouvelables, même si elles sont devenues ultra compétitives sur le plan économique, est aussi question de volonté politique et peut-être plus en France qu’ailleurs où la technostructure de l’atome, les tenants d’un modèle centralisé acteurs du réseau ou encore les grands esprits du régulateur (CRE) n’ont eu de cesse de parsemer le cheminement du solaire de chausse-trappes dilatoires.

Mais d’autres signaux politiques se font entendre, il faut le dire, sous la pression d’une opinion de plus en plus acquise à la cause des renouvelables pour lutter contre les changements climatiques. Quelque chose est en train de changer, de basculer. Lors d’une émission politique de France Inter, France Télévisions et Le Monde, Elisabeth Borne, la ministre de la transition écologique s’en est ainsi prise, ouvertement et sans mettre de gants, à Jean-Bernard Lévy PDG patron d’EDF. En réponse aux allégations de ce dernier qui avait affirmé en octobre qu’« il est clair que la France se prépare à construire de nouvelles centrales nucléaires », la ministre de la transition énergétique a assuré que « c’est très bien » que Jean-Bernard Lévy « ait son point de vue, que je ne partage pas. Il se trouve que la politique énergétique, c’est plutôt le gouvernement et en particulier la ministre en charge de l’énergie que je suis qui doit la définir ».

Voilà qui ne pouvait être plus clair. Et d’embrayer en invitant Jean-Bernard Lévy à « réfléchir » à son rôle au cas où un scénario « 100 % énergies renouvelables » serait retenu à terme pour la fourniture d’énergie en France, aux dépens de nouvelles centrales nucléaires. « Je l’invite à intégrer ce scénario sur lequel travaille le gouvernement, 100 % renouvelables. Il est indispensable qu’EDF réfléchisse aussi à la façon dont il peut être un grand acteur dans un tel scénario », a conclu la ministre. Pas de doute. Le politique commence à s’agacer des projets pensés et imposés par la technostructure française de l’énergie  à l’heure de la transition énergétique.

 

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