André Antolini : « Le moratoire set une mauvaise mesure »

Suite à la conférence de presse donnée par le SER le jeudi 10 Février 2011, afin de commenter le rapport Charpin-Trink, André Antolini, président sortant du SER, a accepté de répondre aux questions de Plein Soleil.

PS: Comment se situe le SER et son président vis-à-vis de la décision du gouvernement par le moratoire du 9 Décembre?

AA : Ce moratoire est une mauvaise mesure. C’est une mauvaise réponse du gouvernement à une bonne question. Il était clair que les choses s’emballaient, l’état a été alerté par les chiffres astronomiques annoncés par la CSPE. Mais c’est seulement le pilotage de la filière qui n’a pas fonctionné. Il ne faut pas prendre de boucs émissaires, la responsabilité est collective. Nous aurions pu éviter le moratoire, mais nous n’avons rien vu venir ! Même l’été dernier, le rapport Charpin ne présageait en rien du moratoire de décembre.

« Calculer le poids à donner aux EnR dans la facture d’électricité »

PS : Vous venez de diffuser un sondage de l’institut LH2, mandaté par le SER pour réaliser une enquête auprès des français, vis-à-vis de l’énergie solaire photovoltaïque. Résultat : près de trois français sur quatre sont disposés à payer plus cher leur électricité pour favoriser le développement des énergies renouvelables. Comment alors expliquez-vous que le gouvernement justifie le moratoire par le fait que ça coûte trop cher à la CSPE et donc aux contribuables ?

AA : Il y a une différence entre payer plus cher et payer trop cher. Si vous prenez par exemple la base de 3 euros par mois pour un ménage comme contribution aux énergies renouvelables, cela fait déjà 36 euros par an. Il y a des ménages pour qui cette somme compte ! De plus, ce sont les ménages modestes qui ont la facture la plus élevée. C’est déjà une somme très suffisante. Si on veut augmenter la facture d’électricité, il faut d’abord calculer précisément le poids à donner aux énergies renouvelables, et en particulier à l’énergie solaire photovoltaïque.

PS: Etes-vous au courant de la polémique qui enfle au sujet des accusations de conflit d’intérêt du groupe EDF-EN ?
AA : C’est aux tribunaux d’en juger, pas à moi. Je n’ai pas de commentaire à faire sur ce sujet.

PS : Pourquoi y a-t-il deux files d’attente différentes : une pour les PME, longue et compliquée, une autre pour les grands groupes (EDF, Total, Schneider) ?
En effet il y a deux files d’attente, qui obéissent à des règles différentes. Les mêmes règles devraient s’appliquer. Mais la CRE n’a pas accepté notre proposition pour homogénéiser les files d’attente. Ce n’est pas nous qui fixons les règles !
[De plus les règles sont également différentes selon que les opérateurs sont en haute ou basse tension.]

« Le photovoltaïque est un combat difficile »

PS:Avez-vous regardé le reportage diffusé sur Arte,(émission « Globalmag »), dans lequel vous êtes interviewé par la journaliste Laura Noualhat? Qu’en avez-vous pensé ?
AA : Oui, j’ai eu l’occasion de le voir. Sur les vingt minutes d’interview, la journaliste n’a gardé qu’une minute. On peut faire dire beaucoup de choses aux gens en découpant les séquences à sa guiseCe reportage ne reflète pas la réalité des choses. Je n’ai pas d’autre commentaire à faire dessus.

PS: Vous quittez la présidence du SER très bientôt. Quel a été votre combat le plus difficile durant ces 13 ans de présidence?
AA : Je crois que c’est la bataille de l’éolien qui a été le plus difficile. Il y a cinq ans, plus personne n’y croyait, on m’avait dit « Abandonne ce combat, c’est fichu »Mais j’ai toujours gardé la foi, et j’ai persévéré. Aujourd’hui nous avons gagné, comme le témoigne entre autres l’appel d’offre sur l’éolien off-shore.
Le photovoltaïque est aussi aujourd’hui un combat difficile, et je défends sept jours sur sept la filière, de la manière la plus efficace possible, avec acharnement, et aussi à ma façon.
Je reste convaincu que c’est l’avenir de la planète que nous jouons, mais je ne méconnais pas non plus les rapports de force qui règnent aujourd’hui dans la société : politiquement, économiquement, etc.

PS: Qu’allez-vous faire une fois le tablier de président rendu?
AA : Je vais m’occuper de mes petits-enfants ! J’ai aujourd’hui 68 ans, et 45 ans de métier derrière moi. Un peu de repos serait le bienvenu. Cependant, je continuerai bien-sûr à prêter mon concours à Jean-Louis Bal au sein du SER, s’il le veut bien, bien entendu !

Cet article est publié dans Infos. Ajouter aux favoris.

Les commentaires sont fermés