« I have ADREAM that one day €»

ADREAM, un acronyme plein de promesses pour « Architectures Dynamiques Reconfigurables pour systèmes Embarqués Autonomes et Mobiles ». Ciel ! Il s’agit en fait d’un bâtiment conçu sur mesure pour un laboratoire du CNRS de Toulouse, le Laboratoire d’Analyse et d’Architecture des Systèmes (LAAS). Un bâtiment solaire à énergie positive au service d’un projet de recherche sur les Smarts Grids où l’homme cohabite avec des robots humanoïdes. Autour de deux fils conducteurs : l’intelligence et le rêve. Retour vers un futur onirique et scientifique

« L’ambition est le triomphe du rêve sur la certitude » écrit Robert Brisebois. Pour bâtir ADREAM, le laboratoire LAAS du CNRS n’a donc pas manqué d’ambition. Et il en fallait. Ainsi, ADREAM est devenu réalité. ADREAM, bâtiment à énergie positive intelligent, a été conçu comme un lieu novateur et vivant, instrumenté à outrance via un réseau de capteurs d’une rare densité. ADREAM, plateforme de tests et d’expériences grandeur nature pour l’étude des smart grids, est bardée de modules photovoltaïques en façade et en toiture. Il est aussi équipé d’un puits canadien et d’une géothermie. Palette renouvelable plurielle au service du bien-être intérieur et du respect environnemental de la planète ! En figure de proue et comme une signature visuelle, il déploie fièrement une verrière photovoltaïque de 330 m² plein sud, inclinée à 65°, à la fois généreuse pour l’électricité qu’elle produit et protectrice pour l’ombre qu’elle prodigue. Ici, pas de raccordement au réseau. L’intégralité de la production d’électricité renouvelable est auto consommée – les besoins du laboratoire étant importants ou bien utilisée à des fins de recherche. Ce bâtiment exemplaire par sa radicalité énergétique est le dernier né des batiments du Laboratoire d’Analyse et d’Architecture des Systèmes (LAAS) spécialisé dans l’automatisme, la robotique et l’électronique. Comme un trait d’union du génie humain dans l’élaboration de l’intelligence des robots humanoïdes (voir HRP2) et celles des bâtiments !

Recherches sur l’efficience post-cellules solaires

Le LAAS est donc l’un des plus gros laboratoires 100% CNRS de France qui emploie six cent cinquante personnes. Il a été fondé en 1968, sur les braises d’un printemps gentiment révolutionnaire. Dans les années 70 qui ont connu deux chocs pétroliers, le laboratoire avait déjà travaillé sur les cellules solaires à concentration avec un concentrateur qui répondait au nom de Sophocle, auteur dramatique qui disait : »Ce qu’on cherche on le trouve ». Les ingénieurs du CNRS de l’époque n’ont pas vraiment eu le temps de trouver, rattrapés par d’autres priorités publiques et un pétrole low cost. En 1996, sous l’impulsion de Corinne Alonso, l’activité solaire reprend au travers de recherches sur l’efficience post-cellule. « Notre travail repose essentiellement sur la gestion de l’énergie produite par les cellules via les onduleurs et les convertisseurs. Nous élaborons des lois de commandes pour optimiser l’ensemble des systèmes. Nous avons passé des accords de partenariat avec Total dans le domaine. Nous collaborons également avec l’école Polytechnique sur les cellules tandem » confie Corinne Alonso directrice de thèse. Pour réaliser ces études, il a ainsi été mis en place, au sein du local technique dédié aux onduleurs solaires, des armoires de commutation qui permettent de transférer l’électricité produite sur huit bancs de recherches dédiés. A l’extérieur, trois locaux batteries lithium-ion, plomb et pile à combustible (PAC) complètent le dispositif. Comprendre les flux, les analyser pour atteindre un climax, affiner les notions de smart grids, tels sont les objectifs des chercheurs.

Une verrière fruit de compromis et d’ajustements architecturaux

Mais revenons à la source de cette production d’électricité renouvelable et à cette fameuse verrière exposée plein sud, « une parfaite hérésie qui ne tient pas la route en matière architecturale » selon l’architecte du projet, Alain Bayle. Ce dernier a pourtant eu le culot de la proposer dans le strict respect du cahier des charges élaboré par le CNRS. « En fait, dans un premier réflexe, nous nous sommes dits que les chercheurs s’étaient trompés. Vouloir faire travailler des gens derrière une telle verrière n’avait pas de sens. Mais nous avons dit banco. Nous les avons suivis à 100% sans savoir où nous allions. Et pour vous dire, en ayant même derrière la tête, l’idée que nous n’irions pas jusqu’au bout de ce projet un peu fou » poursuit l’architecte. Et pourtant, la verrière est bien là comme un porte-drapeau. Elle est le fruit d’échanges constructifs et de synergies probantes entre chercheurs et architectes, où chacun a tenu à respecter le savoir de l’autre. En bonne intelligence, un leitmotiv dans ce labo ! De compromis en ajustements, la verrière a fini par trouver sa place et sa légitimité architecturales. « Les capteurs de la verrière ont été réalisés sur mesure par la société Scheuten. Ils sont de grande dimension (2,94 m x 1,45) pour 529 Wc de puissance. Ils affichent un taux de 90% de remplissage de cellules dans un subtil équilibre entre les apports d’ombrage et l’objectif de puissance fixé à 40 kWc » analyse Nicolas Carbonnelle ingénieur au bureau d’études Tecsol. Derrière la verrière, une coursive permet de déambuler et de se rendre dans la salle d’expérimentation dans laquelle les robots évolueront. La coursive et la salle sont séparées par une baie vitrée qui n’était pas prévue au préalable mais qui a été installée là par sécurité pour créer une sorte de zone tampon.

Une verrière ultra technologique dotée d’un système adiabatique

Alors que nous nous promenons dans cette coursive en ce début du mois de mars très ensoleillé pour interviewer les acteurs du projet, quelque chose nous surprend. A mi-chemin de la coursive, la température change de manière assez marquée, un écart significatif entre tiédeur et fraîcheur. La Gestion Technique Centralisée nous apprendra par la suite qu’il y avait six degrés de différence, d’un côté àl’autre. Comment expliquer cet écart de température ? En fait et dans l’optique d’un projet de recherche de l’INSIS (Etude de l’influence de la température sur le rendement des cellules), cette verrière est composée de deux technologies différentes de panneaux : 50% de modules bi-verre et 50% de modules bi-verre isolés par une lame d’air en double vitrage. En plein soleil et derrière le double vitrage, il fait plutôt frais alors que derrière les seuls modules bi-verre, la chaleur se dissipe dans la coursive. « Ces configurations ont une répercussion sur le rendement des cellules. Les modules bi verre isolés en double vitrage qui emprisonne la chaleur sont soumis à des températures supérieures et sont amenés à produire moins à l’inverse des modules bi-verre qui respirent. Difficile de trouver un compromis entre un bon rendement et le bien-être de vie à l’intérieur des bâtiments » confirme Bruno Estibals, responsable du volet énergie du LAAS. Et les chercheurs d’apporter des solutions ! Lors des fortes chaleurs, les cellules sont thermostatées via un système adiabatique d’échange de chaleur. « Nous avons installé sous le parking une grande réserve d’eau – 300 m- qui affiche une température constante d’environ 15°C. Par un système d’échangeur et de ventilation situé au sous-sol, nous envoyons une lame d’air frais derrière la verrière qui évacue la chaleur vers la terrasse du haut par extraction naturelle et forcée via des ventelles » poursuit le chercheur toulousain. De quoi doper le rendement des cellules tout en préservant le confort des usagers du bâtiment. L’hiver, le dispositif permet de chauffer la galerie.

Toiture expérimentale

L’arsenal photovoltaïque d’ADREAM ne s’arrête pas à cette seule verrière. Sur la partie supérieure du bâtiment, une toiture expérimentale laisse une grande place au photovoltaïque autour de trois technologies. Sur la toiture terrasse modulable qui n’est autre qu’un banc d’essais pour les laboratoires et les fabricants, 19,2 kWc de panneaux solaires photovoltaïques Tenesol (250 Wc à l’unité) sont installés sur des supports lestés à inclinaison réglable entre 0 et 90°. Des modules d’autres marques sont en attente d’installation pour subir une batterie de tests. En position verticale et en bardage sur des supports fixes à 90°, on retrouve des modules Scheuten de grande taille de 529 Wc de puissance unitaire et des panneaux classique en verre-tedlar en silicium cristallin. En toiture R+2, une dernière couche de panneaux posés sur des supports lestés à faible inclinaison fixe (10°) recouvre l’espace. Cette installation d’environ 25 kWc permet à l’ensemble d’atteindre les 100 kWc suivant les objectifs du cahier des charges. Dans un coin, une station météorologique a été installée pour analyser le plus finement possible le rendement des cellules en fonction de la pluie et du beau temps.

LAAS but not least

Si ADREAM génère son électricité grâce aux rayons du soleil, il puise son concept d’énergie thermique – climatisation, chauffage, ventilation – des entrailles de la terre par le couplage d’un puits canadien dont les tubes sont enfouis à cinq mètres de profondeur et de dix-huit sondes de géothermie qui plongent pour certaines jusqu’à cent mètres sous la croute terrestre. Ces dernières sont raccordées à trois pompes à chaleur eau/eau de 50 kW qui assurent le chauffage et la climatisation du bâtiment selon les saisons. Une machinerie très au point ! Ces multiples apports d’énergie sont gérés en interne par Christelle Ecrepont, la véritable chef d’orchestre du suivi de ces installations. « Tout le bâtiment étant bardé de capteurs, nous connaissons les consommations d’énergie, les températures, pièce par pièce, avec pour objectif l’optimisation. ADREAM représente une formidable opportunité d’études d’un bâtiment intelligent équipé de sources d’énergies renouvelables plurielles, électriques et thermiques. Notre devise : LAAS but not least » confie non sans humour la jeune ingénieure. Dans quelques mois, derrière la verrière photovoltaïque du bâtiment du LAAS, un robot humanoïde évoluera dans un espace de recherche high tech transformé en appartement en simulant un travail d’aide à la personne. Un robot, à l’instar du bâtiment, qui pourrait être alimenté par de l’énergie solaire comme un défi à l’intelligence ! « I have ADREAM that one day».

Encadrés

Inauguration de ADREAM le 4 juillet prochain
A vos agendas ! ADREAM sera inauguré le 4 juillet prochain en présence de nombreuses personnalités et des responsables des entreprises qui ont participé à cette aventure, à la fois humaine et technologique.

Caractéristiques techniques photovoltaïques
Façade photovoltaïque : 40 kWc
50% de modules bi-verre
50% de modules bi-verre isolés en double vitrage
Panneaux Scheuten de grande dimension (2,94m par 1,45m)
Surface : 330 m²
Inclinaison : 65°

Toiture expérimentale
Toiture expérimentale : 19,2 kWc sur support à inclinaison réglables (0-90°)
Façade tri-verre : 2,1 kWc
Bardage : 13,4 kWc sur support fixe à 90°

Toiture R+2
25 kWc de modules sur support à inclinaison fixe 10°
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