Thébaïde solaire

120 m² de capteurs solaires photovoltaïques, 16 m² de capteurs thermiques, une éolienne de 6kW de puissance et un groupe électrogène au biodiesel en soutien, tel est le dispositif apte à permettre aux occupants du gîte de luxe Can Rigall, dans les Pyrénées, de vivre leur vacance en autonomie énergétique. Un vrai modèle de tourisme vert de très haut standing!

Loin de tout, niché à flanc de montagne à un peu plus de 800 mètres d’altitude, le vieux mas catalan Can Rigall dispose de onze chambres avec vue et domine le village d’Arles-sur-Tech. En face, le majestueux mont Canigou se pose en vigie des altitudes, montagne sacrée des Catalans. Pour y accéder, en voiture tout de même, on ne compte pas les lacets à emprunter qui deviennent de plus en serrés à mesure de l’ascension. Là haut, le site est magnifique, hors du temps, en prise directe avec mère nature. Une symphonie pastorale pour reposer l’esprit et dégourdir les muscles ! Non loin de là, les sentinelles cathares veillent. En quête de lieux de culture et de villégiature d’exception, la société norvégienne Basecamp Explorer qui exploite trois autres établissements dans le monde (Kénya, Inde et Norvège sur l’île de Spitsbergen, au Nord du cercle polaire) a eu un coup de cÅ“ur pour cette vieille bâtisse pyrénéenne et sa situation !

La solution renouvelable s’impose

En 2008, Basecamp Explorer rachète le mas, une ruine décatie et abandonnée, et les cent cinquante hectares de terres qui l’entourent. Très vite, la problématique énergétique se pose. Le mas était bien raccordé au réseau mais la ligne, située à dix kilomètres du poste source le plus proche, était en très mauvais état. Elle n’était surtout pas dimensionnée pour la nouvelle affectation du mas. Coût de la remise en état de la ligne : plus de 300 000 euros. La solution renouvelable s’est alors imposée. « C’était plus judicieux et moins cher. En fait à peine un peu moins cher mais cela collait avec la philosophie du lieu, dans le calme des chemins de crêt » reconnaît Ian Morlion, le chef d’exploitation, ancien paysagiste. En effet, les énergies renouvelables sont en adéquation avec l’esprit nature et écologique voulu par la société norvégienne. Cependant, l’affaire n’est pas simple même si l’établissement n’est pas ouvert en hiver pour l’instant (ouverture du 1er mars au 30 octobre uniquement). La problématique du chauffage n’était pas prégnante et demeurait secondaire. Cela dit, à 800 mètres d’altitude dans les Pyrénées, les printemps et les automnes peuvent être frisquets, même pour des Norvégiens. Un bureau d’études a donc planché sur le sujet. La géothermie est écartée.

L’une des installations photovoltaïques en site isolé la plus grande du Languedoc-Roussillon

Très vite la piste solaire semble la plus compatible avec le projet. A la fois thermique, pour l’eau chaude, et photovoltaïque, pour la fée électricité ! 16 m² de capteurs plan ont ainsi été intégrés sur un pan de toiture au sud afin d’apporter la ressource en eau chaude sanitaire, pour les salles de bains et la cuisine. Pour la partie électrique, 120 m² de capteurs photovoltaïque sont installés en contrebas sur un châssis exposé plein sud adossés à deux lots de 48 batteries 2000A. A ce jour, cette installation photovoltaïque en site isolé est l’une des plus grandes de la région Languedoc-Roussillon. A quelques dizaines de mètres de là, pointe au-dessus d’un petit bosquet, une éolienne de 6 kWc qui apporte son écot dans ce pays de vent. Les besoins énergétiques du mas sont évalués à 180 kWh par jour. Très vite, pourtant, ils sont revus à la hausse. Il faut dire que la clientèle de standing – on évoque la venue d’une princesse en ces lieux -, même si elle fait des efforts, a ses exigences. « Les artisans n’étaient pas non plus vraiment rompus à l’exercice et les besoins de chauffage sont vite apparus » atteste Ian Morlion. Deux groupes électrogènes (62,5 kVA et 32 kVA) compatible à l’huile végétale, ont donc été installés pour faire le compte. En transition !

Détails solaires et projet de chaudière bois

Car dans le même temps Ian Morlion a initié une démarche d’économie d’énergie. « Les détails font la perfection et la perfection n’est pas un détail » écrivait Léonard de Vinci. Ian Morlion a donc changé les pompes du système de circulation d’eau chaude et installé des led dans l’ensemble du mas. Un bon début pour se rapprocher à nouveau du seuil des 180 kWh/jour ! Depuis toujours, les chambres sont dépourvues de mini bar et de téléphone et le grand mas ne dispose que d’une seule télévision dans un salon dédié. Il faut dire qu’au mas Can Rigall, le spectacle est dehors, dans la contemplation des grands espaces. Les témoins lumineux des marches pour accéder au mas de nuit sont aussi photovoltaïques tout comme le fonctionnement du portail à l’entrée du domaine. Des détails solaires pointillistes ! « Cela nous a évité de tirer une nouvelle ligne » résume pragmatique le chef d’exploitation qui cultive un potager bio à ses heures perdues. Mais le futur grand projet énergétique de cette thébaïde pyrénéenne sera l’installation d’une chaudière bois pour réaliser un chauffage central 100% renouvelable et, par la même, étendre enfin la saison d’ouverture au mois d’hiver, quand la neige viendra blanchir la margelle de la piscine.

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