Edito/Il faut que tout change pour que rien ne change

Lorsqu’Arnaud Mine, président de SER-Soler évoque le destin de la filière photovoltaïque française, il parle de malédiction. Mais ne pourrions-nous pas parler aussi d’acharnement ? L’acharnement dont a fait preuve par exemple le nouveau et sémillant PDG d’EDF à l’Assemblée Nationale lors de la Commission d’Enquête relative aux tarifs de l’électricité. Jean-Bernard Lévy n’a pas attendu trop longtemps pour prendre pour cible le solaire photovoltaïque, responsable selon lui de tous les maux, sur fond de pêché originel d’un tarif d’achat trop élevé.

Qui veut noyer son chien l’accuse de la rage ! Jean-Bernard Lévy se focalise donc sur le photovoltaïque d’avant 2011, celui qui il est vrai va coûter 2,2 milliards d’euros à la charge de la CSPE en 2015. Mais personne n’est dupe et chacun sait que ces tarifs qui avaient pour objectif de faire effet de levier sur une filière en phase de démarrage, sont demeurés démesurément attractifs trop longtemps, alors même que les syndicats professionnels demandaient une révision rapide à la baisse. De quoi faire germer dans certains esprits une forme de théorie du complot à l’encontre d’une énergie gratuite et propre susceptible de bousculer les grands équilibres.

Alors certes, Jean-Bernard Lévy reconnaît tout de même que les prix d’achat ont diminué depuis 2011, non sans insister sur le fait que le photovoltaïque reste encore loin de la compétitivité et que son développement continue d’occasionner des surcoûts. « Nous sommes loin, très loin du coût du nucléaire, sans même parler de l’intermittence, puisque par définition, il ne fait pas soleil tout le temps et cela conduit à des coûts indirects induits qui sont élevés ».

Et Jean-Bernard Lévy de sortir l’argument ultime, celui de l’impact du solaire sur la balance commerciale à hauteur de plus de 500 M€ par an, « puisque malheureusement l’essentiel des panneaux solaires sont importés d’Asie ». Des éléments de langage tellement stéréotypés, tellement rabâchés, tellement mécaniques, qu’ils confinent à l’acharnement inepte. Ils relèvent du dogme, d’une idéologie figée dans un immobilisme énergétique d’un autre temps. « Il faut que tout change pour que rien ne change ». Vous vous rappelez, Le Guépard saisi entre deux mondes, l’irrésistible déclin de l’ancien et l’avènement révolutionnaire du nouveau

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